Après l’accord des États membres de l’European Sky Shield Initiative (ESSI) concernant la demande d’adhésion de la Suisse, le directeur général de l’armement Urs Loher a signé, le 17 octobre 2024, le protocole d’accord et la déclaration d’adhésion unilatérale de la Suisse.
Sky Shield ou le bouclier européen
La demande
Le 10 avril 2024, le Conseil fédéral a décidé d’adhérer à l’ESSI et autorisé le DDPS à signer le protocole d’accord lié à l’ESSI sur la passation de marchés publics en coopération tout comme la déclaration d’adhésion unilatérale supplémentaire de la Suisse. Les Commissions de politique extérieure et les Commissions de la politique de sécurité ayant également approuvé l’affaire, le DDPS a lancé la procédure d’adhésion le 8 juillet 2024 avec la signature de la demande d’adhésion par le directeur général de l’armement Urs Loher. Dans le cadre d’une consultation consécutive, les États membres de l’ESSI ont approuvé sans réserve la participation de la Suisse. Le 17 octobre 2024, Urs Loher a alors signé le protocole d’accord et la demande d’adhésion unilatérale supplémentaire de la Suisse.
Un protocole d’accord à base spécifique
En participant à l’ESSI, la Suisse accroît ses possibilités de coopération internationale : l’ESSI permet une meilleure coordination des projets d’acquisition, de l’instruction et des aspects logistiques dans le domaine de la défense sol-air (DSA). Le protocole d’accord définit les dispositions générales de mise en œuvre de projets et de programmes par les États membres pour une acquisition en coopération de systèmes de défense sol-air et les échanges possibles dans d’autres domaines de coopération. État signataire de l’ESSI, la Suisse peut à présent conclure séparément des accords spécifiques distincts pour certains projets et programmes dans le cadre du protocole d’accord. La défense sol-air de moyenne portée est pour l’instant l’objectif prioritaire, mais il existe aussi des possibilités de coopération attrayantes dans le domaine de la défense aérienne de courte et moyenne portée.
L’ESSI est compatible avec la neutralité
La signature de la déclaration d’adhésion au protocole d’accord n’entraîne aucune obligation. Même après la signature, la Suisse reste libre de décider où et dans quelle mesure elle entend participer à l’ESSI et quels systèmes elle veut acquérir. Comme lors de la signature de la déclaration d’intention en juillet 2023, dans laquelle la Suisse et l’Autriche ont exprimé dans une déclaration complémentaire leurs réserves liées au droit de la neutralité, la Suisse a également inscrit en sus, dans une déclaration d’adhésion unilatérale publique, ses réserves liées au droit de la neutralité dans le cadre de la signature du protocole d’accord. Cette déclaration renvoie en particulier à la clause de suspension du protocole d’accord, qui permet à la Suisse de se retirer de la coopération en raison de sa neutralité si un membre de l’initiative devient partie à un conflit armé international.
Système Iris SLM/S @ Diehl Defense
La Suisse en partenaire
Notre pays est un partenaire de longue date de la sécurité en Europe. Cette collaboration est vouée à se renforcer afin de faire face au développement d’une multitude de menaces. Dans le cadre de la défense aérienne et balistique, un gros effort est en préparation avec l’achat du système sol-air Raytheon Patriot qui fonctionnera en binôme avec les futurs avions de combat Lockheed Martin F-35. La collaboration Patriot/F-35 servira également à renforcer la défense aérienne au centre Europe avec nos voisins comme l’Allemagne, l’Italie et l’Autriche.
Le principe de l’entrée de la Suisse dans l’initiative « Sky Shield » doit permettre de fixer les bases étendues de cette collaboration et également de renforcer les liens en vue d’acquérir de nouveaux systèmes qui s’intègreront au sein de « Sky Shield ».
Continuité d’Air2030
Le projet « air2030 » n’est pas terminé, il s’agit d’un ensemble de modernisations qui comprendra le remplacement des radars de détection à basse altitude de type Westinghouse TAFLIR, ainsi que les deux systèmes de défense sol-air de courte et de moyenne portée en service actuellement.
Les systèmes de moyennes portées de type BAe Rapier (retirés en 2022) et le système de canons Oerlikon de 35 mm et la conduite de tir Skyguard doivent trouver un remplaçant. Le futur système devra donc fonctionner en réseau avec les Patriot/F-35 et pouvoir fonctionner dans le cadre du système européen de « bouclier ». Le système Diehl Defense Iris SLM semble en bonne position. Puis, viendra le temps en 2030 de remplacer les missiles de courte portée Stinger, certainement par une arme polyvalente mobile, multicible (avions, drones, hélicoptères) et autonome de type SHORAD.
En octobre 2022, les États européens (Belgique, Bulgarie, République tchèque, Estonie, Finlande, Allemagne, Hongrie, Lettonie, Lituanie, Pays-Bas, Norvège, Slovaquie, Slovénie, Roumanie, Royaume-Uni) ont signé une déclaration d'adhésion à l'Allemagne.
En février 2023, le Danemark et la Suède ont rejoint le projet. En juillet 2023, l'Autriche et la Suisse, ont signé la déclaration de participation à l'initiative.
Pas de contrainte d’achat
On entend souvent à propos de l’initiative Sky Shield, que les pays membres pourraient se retrouver dans l’obligation d’acquérir des systèmes uniquement issus de pays membres de l’accord. Il n’y pas de contrainte dans les accords de l’ESSI, chaque membre peut acquérir les systèmes de son choix. Dernièrement, la Slovaquie, un des pays membres depuis les débuts de l’ESSI a choisi en août dernier d’acheter 10 systèmes sol-air israéliens Barak MX. Ce système tout comme le pays d’origine ne sont pas liés à l’ESSI.
L’initiative Sky Shield
Cette initiative réunit 21 pays, dans le but de créer un système européen de défense antiaérienne et antimissile par l’acquisition d’équipements communs. Face à la montée en puissance d’une menace aérienne russe, notamment.
La dangerosité des missiles balistiques et hypersoniques
À l’heure actuelle, les missiles balistiques à trajectoire tendue permettent de frapper n’importe quel point du monde et depuis n’importe quels continents. Il en va de même avec la nouvelle génération d’armes hypersoniques à rentrées atmosphériques (missiles de croisière, véhicules à vol plané ou accéléré) qui se déplacent à une vitesse de Mach 5 ou plus, conservent une manœuvrabilité et suivent des trajectoires à basse altitude, difficiles à suivre. Leur interception est plus difficile que celle des missiles balistiques. Ces engins employés en Ukraine par les Russes comme les missiles Zircon ou lors de la seconde attaque iranienne sur Israël avec une combinaison de missiles balistiques Emad et Qadr ainsi que des engins hypersoniques Fattah 1 démontrent les nouveaux risques auxquels nous sommes confrontés.
Défense aérienne efficace
La Défense aérienne doit être pensée de manière globale. Elle est techniquement très exigeante, car de nombreux facteurs interconnectés sont impliqués. Pour minimiser les dangers, l'ensemble du processus doit donc être parfaitement lié, de la reconnaissance d'une menace par radar ou satellite jusqu'aux unités de combat en passant par une structure C2. Ce processus doit être efficace et rapide, car dans la défense antimissile, il ne s'écoule parfois que quelques minutes entre le lancement et l'atteinte de la cible. Les missiles russes Iskander stationnés à Kaliningrad n'en sont qu'un exemple. Il ne leur faudrait que quelques minutes pour atteindre n’importe quelle capitale en Europe.
La défense aérienne intégrée implique la prise en compte de toutes les dimensions militaires : terrestre, aérienne, maritime, cyberespace et spatiale. Différents systèmes sont déployés : avions de combat, systèmes sans pilote, systèmes terrestres, frégates de défense aérienne, systèmes informatiques et satellites. Tous ces systèmes sont conçus de manière à créer des couches et des domaines qui se chevauchent les uns les autres. Cela doit rendre le franchissement des défenses aussi difficile que possible pour l'ennemi. Pour pouvoir réagir immédiatement à une menace, la défense aérienne doit être prête 24 heures sur 24 à repousser les avions, drones ou missiles ennemis à différentes distances et altitudes.
Ces capacités doivent permettre de contrecarrer les attaques réussies de l’ennemi et de ne pas permettre à celui-ci de submerger les systèmes de défense, ni techniquement ni par saturation, c’est-à-dire par supériorité quantitative. De toute façon, il est impossible d’obtenir une sécurité totale, car aucun système au monde ne peut garantir une protection à 100 %. Des défaillances techniques peuvent survenir dans la chaîne d’action globale tout comme des erreurs humaines. Pour autant, tout doit être fait pour garantir un maximum de sécurité.
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